vendredi 2 novembre 2012

EUX...A LA COQ!


“Fier descendant de la famille des gallinacées, le coq de basse-cour gouverne son poulailler sans partage, rappelant chaque matin du haut de son promontoire comme il est fort, beau, malin, etc”…

Si son plumage l’aide à peaufiner son image, son caractère de mâle dominant se devine, entre autre, à travers sa façon de se déplacer. Panamera rutilante, Audi Q7 flamboyant, les joujoux ronflants de maître Coq sont un peu comme un prolongement de son système génital. Une fois installé à bord, tout moteur vrombissant, notre ami exulte et s’enferme aussitôt dans un carcan qu’aucune voix ne saurait pénétrer. La poussée brutale de testostérone provoquée par le symbole vibrant de sa toute-puissance entrave toute communication. Un seul but: pavoiser sur les avenues en espérant susciter l’admiration des poules du quartier. Rappelons que la plupart du temps, le ramassage à la sauvette séduit davantage les dindes que les poulettes. Bref…

Dans la volière, son terrain de jeu favori, la poulaille se décompte à la tonne, envoyant les décibels taquiner les hauteurs de ses gloussements assourdissants. Lorsqu’il débarque, brillant comme un sou neuf, c’est armé jusqu’aux dents- de préférence blanchies à outrance. Sourire émail diamant donc, crête gominée à la cire indégommable, el macho relève un sourcil en toisant ses proies l’une après l’autre d’un air de dire “ma poule ce soir c’est ton soir, remercie l’ciel de m’avoir mis sur ton chemin…”

Le drame du coq, c’est sa certitude: le moindre caquetage est interprété comme une marque d’intérêt pour son ego disproportionné. Il est convaincu de convaincre… Persuadé de sa propension à séduire tout ce qui porte une plume, le blanc-bec affiche une condescendance à toute épreuve, ce qui lui vaut la méfiance de ses cibles et souvent la moquerie de ses compères.

L’objet de ses convoitises est plus quantitatif que qualitatif: le rabattage à échelle quasi industrielle lui donne l’impression de rivaliser avec les grands séducteurs de ce siècle. Jouer dans la cour des grands pourrait être une ambition tout à fait respectable, mais nous parlons ici de basse-cour, et le coq n’a bien souvent de grand que son appétit.

Depuis tout poussin, trop couvé par sa mère, il subit un matraquage intensif: le chef de poulailler se doit d’être puissant et exemplaire, valeureux et conquérant. Mais jamais aucun volatile ne prit le temps de lui expliquer que la poularde d’antan avait pris son envol, que la cocotte de maintenant ne comptait même plus sur lui pour élever ses ouailles, quand elle ne va pas jusqu’à le plumer en cas de séparation!

C’est donc un peu égaré dans son propre poulailler que notre pauvre poulet désespère de se faire remarquer…

 

vendredi 7 septembre 2012

MORUELAND


“Maa chériiiiiiiiiiiiiiiiie”, c’est leur cri de guerre. Le monogramme - surtout quand il est faux- c’est leur blason. Pour exister à Morueland, il faut être vue, repérable à 10 bornes.

Dans un pays qu’on croirait fort fort lointain, vit depuis la nuit des temps une espèce en voie de prolifération: la morue. Un peu comme le grand requin blanc, elle n’a pas évolué d’un iota depuis des millénaires. Le corps fuselé pour davantage d’aérodynamisme, un regard d’oiseau de proie empreint d’antipathie, tout chez la morue est pensé pour attirer le sexe fort au premier coup d’œil.

De même que la famille de Bretagne affiche une panoplie interminable d’armoiries, la morue collectionne les swooch, les YSL et le fameux LV, pour parfaire son apparat. C’est ainsi dissimulée sous les couches clinquantes de son vestiaire brandé qu’elle déambule en public. La fameuse brandade de morue donc. OK, je sors…

Toujours à moitié dévêtue, cette espèce de cabillaud finit d’ailleurs parfois par adopter la version cutanée des signatures de ses marques favorites, en guise de body painting.

Vous ne pouvez pas la manquer ni l’ignorer d’ailleurs; quand la morue est invisible elle n’en est pas pour autant silencieuse. Elle minaude, d’une voix nasillarde, au creux de l’oreille de l’Homo Sapiens mâle et invective tout ce qui se dresse sur son passage. “Tortillades”, “trémoussades”, quand la morue part en promenade, on s’écarte sur son passage, les uns observant hagards ses déhanchés exagérés, les autres redoutant une dérobade de mari… Experte en matière de racolage massif, elle n’en sous-estime pas pour autant ses congénères, qu’elle ne peut endurer. Son credo: ratisser large du CSP, CSP+ à grand coups de filet de pêche pour trier les meilleurs morceaux, ceux qui combinent un apparent pouvoir avec un flagrant confort financier…

Morueland, c’est le quartier général où tous les individus de cette espèce pourtant solitaire se réunissent. Entre elles, pas d’amitié, que du réseau. La chasse en groupe les forcent à se côtoyer, mais la rivalité empêche toute solidarité. Morueland se situe en général dans les zones chaudes mais n’a pas d’adresse fixe; tantôt sur la piste de danse d’une boîte tendance, tantôt autour de la piscine d’un hôtel club, le grand rassemblement du poisson d’eau froide se déplace au gré de ses migrations.

Souvent qualifiée de “Grosse” ou de “Sale”, la version bas-de-gamme de ce vertébré est particulièrement écervelée. Moins nocive et surtout plus comique que ses consœurs, elle incarne le vulgaire maladroit. L’indiscrétion la pousse aux gaffes les plus folles, tentant d’exister par tous les moyens, “et pas seulement par le physiiiique hein!”.

La morue symbolise la part obscure et sombre dont chaque femme est finalement capable à force d’abus. Une fois dos au mur, ne vous déplaise, on est toutes un peu morues sur les bords…

 

vendredi 13 juillet 2012

CELIBAT: LE MONDE DU SILENCE?


Célibat : le monde du silence ?

Le célibat c’est comme l’apnée: une immersion dans un monde qui n’est pas le mien, sans réserve d’air. On retient sa respiration, on ferme les yeux avant de se jeter à l’eau, et là une fois immergés, on découvre…

Je me suis retrouvée comme ça les yeux écarquillés -exorbités mêmes- avec cet air intelligent qu’on a quand on croise un banc de mérous, ou de morues… Le problème c’est qu’un trop grand nombre de mérous a dessalé une quantité inavouable de morues, et qu’aucune des deux espèces n’est facilement repérable dans les obscurs abysses du solitariat. Le solitariat, cette attitude rarement assumée de l’état de solitude ostentatoire que chacun porte comme un fardeau.

Divorcé(e) ou veuf(ve), en 2012 ces termes sont encore un état civil, comme si l’on se définissait comme la moitié d’une paire, comme l’échec d’un passé vécu à deux.

Fraîchement débarquée de ma tour d’ivoire où je fus enfermée pendant quelques 20 années à chérir le nid sécurisé de mon couple, me voilà en plein baptême dans le grand bleu, prête pour le grand frisson- aucun rapport avec la température de l’eau…

Alors j’éteins ce qui me sert de matière grise, me jette à l’eau et découvre dans la stupeur les quelques bases d’une apnée réussie:

-premièrement: ne pas se fier aux apparences

NON, toutes les espèces dotées de mâchoires acérées ne sont pas forcément affamées ou agressives. OUI les espèces colorées sont très attirantes… mais la plupart du temps venimeuses. C’est ainsi que j’apprivoisai la méfiance spontanément inspirée par les champions de la drague qui, surentraînés, déballent au quintal la liste de tous vos attributs personnels comme le ferait un piètre commercial. C’est ainsi qu’on m’enseigna que la magie provoquée par la rencontre de 2 êtres qui s’attirent comme des aimants n’est pas forcément durable. Dans le monde infâme du solitariat, on vend du rêve mais le service après-vente n’est jamais garanti.

- Règle N°2: débusquer les intrus

NON, tous les habitants du solitariat n’en sont pas tous originaires, d’autres sont immigrés temporaires, volontaires ou pas d’ailleurs. Le problème c’est que certains clandestins tout droit débarqués du couplariat s’introduisent incognito dans les profondeurs, et que nulle part dans les contes de fées, on ne vous a expliqué que le prince charmant avait déjà la corde au cou avant de rencontrer sa belle.

Alors quelle attitude adopter?

Ne rien attendre et prendre ce qui est à prendre, voilà ce que m’assène le Grand Conseil des Célibattants, groupuscule de légionnaires du célibat, rompus aux entraves en tous genres et toujours pleins de conseils avisés pour éviter aux novices certains écueils redoutables. Pour moi, cela revient à continuer à palmer dans les courants marins sans avoir la moindre idée de la destination finale, et l’éventualité d’une dérivante sans issue me paraît compliquée à envisager. Seule l’expérience me dira si l’application du conseil est salutaire.

Je dois l’admettre, je suis une guimauve.

La guimauve: friandise sucrée aux couleurs chatoyantes. En d’autres termes: une onctueuse sucrerie qui se fond en une pâte mollasse dès que le mercure se met à grimper. A la moindre esquisse de désir sensuel, à la moindre parole enchanteresse, de bonne grâce je tressaille. Ce fluide émotionnel bouillonnant qui parcourt le corps, laissant les rêveries balayer le champ des possibles d’un avenir en duo me rend …désespérément mièvre. Et cela m’insupporte.

D’habitude j’affronte, pleine de bravoure, l’adversité. Les obstacles me sont familiers et je m’en défile rarement. Je me voulais fiable, déterminée, pleine de recul… mais bercée par les histoires d’Andersen, Perrault et autres Grimm, voilà qu’en plein champ de bataille de la vie d’adulte, je me fais rappeler à l’ordre par tous les organes de la naïveté puérile. Nigaude et niaise, voilà le résultat auquel me conduisent les aventures romantiques du célibat. Enfin des aventures…disons plutôt une sorte d’errance à la conquête de la véritable idylle, celle où les acteurs feront fi du qu’en dira-t-on, lorsque la peur de souffrir sera vaincue par la force des sentiments… bref, quand l’Homme aura compris qu’aimer n’est pas dangereux, que la honte devrait être celle de détester haut et fort, et qu’en dépit de la longévité, l’intensité reste l’essentiel.